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De la sécurité à l’obscurité

De la sécurité à l'obscurité

Voici la suite des extraits d’un article écrit en 2016 :  Cette section était intitulée alors « de l’obscurité à la sécurité », mais l’actualité pousse à en inverser les termes : quand la volonté de sécurité se fait excessive, elle passe au service des ombres …

« Pour les décideurs, dirigeants et gouvernants, négliger les apports des sciences humaines et des approches qui cherchent à éclairer les phénomènes subjectifs,  c’est passer allègrement à côté des processus générateurs des réponses qu’ils jugent excessives, voire pathologiques, aux difficultés objectives… C’est se condamner à lutter contre les débordements à coup de lois sécuritaires ou privatives de liberté, et de multiplication des moyens de renseignement. 

Devant la peur de l’obscurité, c’est « rassurez-vous, nous mettons des barrières et des filets de protection » au lieu d’éclairer le paysage !

Outre le fait qu’un tel arsenal met en question les fondements même de notre vision de la démocratie, et en danger les équilibres, il risque fort de s’avérer contre-productif. En effet, de telles réponses conduisent tout autant à des excès confinant à la pathologie que la croyance naïve ou irrationnelle, ou que la morale –religieuse ou profane-,  même si leurs excès respectifs ne sont pas de même type.

Ces réponses s’inscrivent dans les jeux d’action et réaction qui voient croître d’un côté les « radicalités explosives », et de l’autre « les autoritarismes haineux » : comment –à condition qu’on le veuille, ce qui n’est pas certain –  sortir de l’engrenage ?

 Obscurité vs lumière ?

Face à ces temps obscurs, le bon sens serait, pour les penser, d’activer la polarité qui leur est opposée : la lumière … Mais laquelle allumer ? 

  • Celle de la science, lumières de la raison ?
  • Celle de la morale, laïque ou religieuse  (après tout, les « valeurs de la république » ne sont-elles pas une autre forme de lien vers un absolu, une « religion laïque») ?
  • Celle d’un chef, ou d’un sauveur : homme (ou femme) providentiel dont viendrait le salut ?
  • Celle d’une information réellement transparente sur les arrières–plans de « ce qu’on nous cache » ?
  • Celle du spirituel, lumières de l’Esprit ?

Le piège est évident : toute forme de lumière peut très vite se traduire en « Vérité » unique, qu’il faudrait donc atteindre …  (L’insecte n’est-il pas à tel point focalisé sur le point lumineux qu’il ne perçoit pas la sortie, pourtant juste à côté) ? Et une fois atteinte, il reste à l’imposer aux autres, encore sombres ignorants : Ainsi, de LA VÉRITÉ à l’absolutisme le pas est vite franchi !

C’est d ‘ailleurs dans ce piège que s’engouffrent souvent les chefs charismatiques, habillant leur volonté de pouvoir des atours de leur propre vision idéale pour capter les désirs individuels d’idéal,  et  « vectoriser » les pulsions de la masse !

Comprendre les « complexités subjectives » :

Chacun sent bien pourtant que quelques rayons de ces lumières-là  nous seraient bien précieux. En effet, ces temps obscurs qui se présentent nous donnent à réfléchir  à tous ces phénomènes, et ce d’autant plus urgemment que les effets du chaos engendré par les causes objectives se manifestent puissamment, et bruyamment,  par les conséquences ­-bien visibles–  de leurs effets subjectifs –invisibles – !

Dans les jeux d’action et réaction, tant que l’on fonde sa pensée sur une vision linéaire, mono-centrée, et ses réponses sur des représentations binaires des réalités subjectives, on est incapable de composer consciemment avec les ambivalences et paradoxes qui sont le fruit de nos complexités, et on adopte inévitablement des options tranchées, dont l’effet est souvent de déplacer le symptôme, ou pire, d’amplifier les causes, et les donc les oppositions.

La danse éternelle des rebelles idéalistes contre les conservateurs protectionnistes se déroule sur la musique commune de l’absolutisme. Si les valeurs de chaque camp sont opposées, le processus est similaire  : « J’ai raison, l’autre a tort » !  Il ne faut pas pousser le bouchon très loin pour que le rebelle se fasse terroriste, et que le conservateur devienne dictateur sécuritaire ! »

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Alors, ce texte  écrit en 2016 ; vision juste  ou prémonitoire ?

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